Entretien à la "Chopine flamboyante"

L'auberge était bien tenue, sans être cossue pour autant. Le tavernier, Ariber, était un homme grand et maigre, au teint pâle et aux cheveux roux. Il parlait peu mais souriait souvent, et ce sourire suffisait à lui donner bonne figure et inspirer la confiance. C'est sa soeur, Solyane, qui faisait le service, et d'aucun disait que c'était la plus jolie alberguière de la ville. Mais si ce titre était contestée, tous savaient que celui qui la toucheraient sans son accord subirait les foudres d'Ariber. Et les colères d'Ariber étaient aussi connues que la spécialité de la taverne : le chogloth !
Cet alcool ramené (d'après Ariber) d'un voyage lointain où il avait risqué sa vie pour le plus grand bonheur de ses clients, était servit enflammé et devait être bu ainsi. Il revigorait les corps et ravissaient les cœurs. Ariber avait même mis au point le choglothorm, boisson de même type mais beaucoup plus forte, qui n'était servi que lors d'évènements bien particuliers, ou pour des concours peu respectables.
L'ambiance était bonne, le foyer bien nourri et les clients satisfaits. L'auberge sentait le bois et le rôti; et le tabac, l'alcool et les parfums féminins luttaient pour la prééminence.

C'est dans ce contexte et par un temps gris et venteux qu'entrèrent Dartoil et Koveras. L'un était sombre par les habits et l'autre par l'âme.
Un silence prudent accueilli les deux hommes. Si peu de clients connaissaient encore Dartoil, tous connaissaient Koveras et redoutaient son imprévisibilité. Paradoxalement, on le préférait sombre et taciturne. Cela signifiait qu'il resterait seul à méditer sans mot dire, alors que ses sourires et faux semblants conduisaient trop souvent à le considérer comme un camarade de boisson, et ceci amenait à des malentendus regrettables.

On se rassura : Koveras avait visiblement vieilli, et il était accompagné.
Ariber salua le seigneur de Galathorn, et celui-ci lui rendit son geste. Solyane nettoya brièvement une table un peu à l'écart, et les deux serviteurs du Calice purent s'asseoir. Leur furent servis quelques pièces de volailles rôtis, un pichet de vin et le pain le plus blanc. On leur assura qu'on leur préparait davantage en ce moment même, et qu'il faudrait peu patienter. Koveras acquiesca, et on les laissa non loin de l'âtre :

"Êtes-vous à votre aise mon ami? Certes ce lieu n'est guère reluisant pour des gens de notre qualité. Mais j'en apprécie la convivialité et en goûte la rusticité. Celle-ci me rappelle quelque peu mes premières années...
Un bref silence s'installa. Koveras sourit à nouveau.
Non pas que je sois malade. Non! Mais voyez-vous je me sens bien las et le temps de mes glorieuses chevauchées et de mes actions éclatantes ont passé. Je ne suis qu'un homme, et je sens bien que le soleil descend peu à peu sur la cours de ma vie.
Mais ne m'écoutons pas! Et je suis davantage curieux de mieux connaître Rotergan. Quels sont vos domaines messires? Et d'où vous viennent vos talents?"
Le Chancelier du Calice se servit un peu de vin. Et lorsqu'il le porta à ses lèvres, Dartoil vit que, si Koveras avait vieilli, son regard avait gardé une flamme aussi vive que ténébreuse...

Assassin d'Elite du Calice Messages : 228 Date d'inscription : 18/05/2009

Alors que le temps se gâtait, le Capitaine invita Dartoil dans une auberge afin de s'y rassasier. Bien que la demande se fasse insistante, Dartoil n'avait aucune raison de vouloir refuser et le suivit.

C'était à la fois l'occasion de voir d'autres bâtiments de la forteresse, mais aussi de mieux connaître le diplomate du Calice.

Aussitôt rentré, les réflexes de l'assassin prirent le dessus. Alors que les 2 hommes se dirigeaient vers la table qui avait été nettoyé par une ravissante serveuse, Dartoil connaissait déjà le nombre exact de personne dans la pièce, une évaluation de la force de chaque personne ainsi que de chaque groupe. On pouvait également facilement deviner que le Capitaine était très connu ici ce qui attirait forcément les regards.

Continuant à observer autour tout en écoutant Koveras, il avait évalué les groupes de personnes qui avaient le plus de chance de générer une bagarre.

Son interlocuteur avait déjà eu le temps de poser plusieurs questions, Dartoil avait finit d'analyser la pièce et reposa son regard sur Koveras.

Je ne me considère pas comme une personne de haut rang, après tous, je ne suis qu'un assassin. C'est pourquoi je trouve que cet endroit me convient parfaitement, je pense d'ailleurs que je m'ennuierais dans un endroit plus chic.

Seriez vous entrain de nous faire une crise de vieillesse? Je pense que vous avez encore de nombreuse année de gloire devant vous et que l'age la plus importante, c'est s’elle que l'on a dans la tête.

Dartoil fît un léger sourire pour lui redonner plus de morale. N'ayant plus d'utilité à analyser la salle, il observa les expressions du visage de Koveras. Il considérait toujours les expressions plus parlantes que les paroles elle-même.

Rotergan... Rotergan se situe au Nord-Est de Thassopole, en bordure de mer. Je ne suis pas certain que son histoire, et la mienne qui y est lié vous plaise, enfin disons plutôt que je ne vous connais pas assez pour savoir comment vous réagirez.

Il vaut donc mieux éviter de la raconter. En ce qui me concerne, j'ai été entraîné à tué depuis mon plus jeune age. On commence à tuer de loin, puis petit à petit on se rapproche afin de finir par tuer sa proie en l'égorgeant avec une petite lame.

Peux t'on appeler ça du talent? Non, mais de l'expérience très certainement.

L'expression du visage de Dartoil était aussi noir que ses vêtements durant ses quelques paroles. Se rendant compte qu'il avait déjà bien trop parlé de lui, il reprit une expression plus banale et surtout plus contrôlée et chercha à changé le sujet.

Mais je suis sûr que votre histoire est bien plus joyeuse que la mienne, pourquoi ne pas me conter comment vous en êtes arrivé à un tel poste au sein du Calice?

Les lèvres de Koveras goûtaient déjà la fraîcheur de la chope métallique lorsque tomba la question de Dartoil. Koveras se figea un instant et, abaissant ladite chope, découvrit un sourire carnassier.
C'est là une bien longue histoire que vous me demandez de conter là, ami. Et cette histoire n'est pas forcément des plus belles. Disons que le sang de quelques "concurrents" mêlé au miel de quelques paroles m'ont mené plus loin qu'il n'est d'ordinaire permis aux gens de ma condition. Mais le Calice fut, et le seigneur Koveras devint son serviteur. Depuis lors, je suis sa bouche, son héraut, celui qui sonne sa trompette et lève ses étendards, relaie son appel et maudit les impies.
Je suis le porteur de nouvelle, je suis le serviteur de Calice et le suivant de sa Détentrice...

A chacune de ses paroles, la voix de Koveras sembla onduler, telle une vague progressant avec houle. Ses mots s'élevèrent, et un silence s'était installé dans tables les plus proches. Les yeux du seigneur de Galathorn avaient luis d'une détermination et d'une force effrayante. C'était là les paroles d'un fanatique, à n'en point douter.

Mais, calmement, Koveras reprit sa coupe et retrouva la posture décontractée et maintenue qui avait été la sienne.

Quant à ma santé, très cher Dartoil, ne vous en souciez donc pas. Si l'âge a étendu son ombre sur moi, je n'ai pas encore dit mon dernier mot. Ce mal -bien qu'en théorie inéluctable- ne sera bientôt qu'une vieille épouvante...
Sur ces mystérieuses paroles, Koveras but.

C'est alors que la porte claqua. Le vent s'engouffra dans la taverne et un homme à la cotte de mailles usa et aux favoris grisonnants hurla d'une voix joyeuse :
Joie! Joie et Victoire! Les Fils de Brak ont cessé leurs assauts et leurs troupes ont partout reflué! Victoire! Victoire!

La rumeur se propagea rapidement, et partout on se mettait à trinquer en saluant la victoire des forces d'Halinna. Mais partout on évoquait le mérite des troupes de Rotergan. Petites et rapides, celles-ci avaient méticuleusement étrillé une à une de nombreuses hordes de Barbares. Quelques voisins de tables murmurèrent alors, et saluèrent de la tête Dartoil.

Koveras souriait, comme de coutume.

Il semble que vous ne soyez plus "un simple assassin" messire.

Assassin d'Elite du Calice Messages : 228 Date d'inscription : 18/05/2009

Koveras resta évasif sur son histoire, à première vue on aurait même pu penser qu'il avait fait les même chose que Dartoil.

Cependant a bien y réfléchir, le sang de quelques "concurrents" n'avait certainement rien à voir avec le nombre de personnes qu'il avait assassiné afin d'être à la tête de Rotergan.

Avoir des concurrents c'est déjà avoir une place importante ou il ne reste qu'une poigné de personne à battre. Dartoil lui n'était pas prédestiné à devenir seigneur, Il dût espionner, tuer, manipuler et encore tuer afin de voler la place qu'il avait aujourd'hui.

La nature de ses deux hommes attablée est finalement bien différente et l'assassin estima qu'il avait bien fait de ne pas en dire d'avantage sur lui, le Capitaine aurait pût ne pas apprécier ses actes et cela aurait nuis à leurs relations.

Dartoil en vint à la conclusion que ce qu'il y avait à savoir sur Koveras était son dévouement pour le Calice, et que pour cette cause, il serait prêt à donner sa vie.

C'est alors que les cris résonna dans toute la taverne. Les barbares avaient perdu la guerre et s'était enfuit.

Plusieurs yeux s'étaient fixé sur eux, suivit de saluement de la tête. Cela ne plaisait guère à Dartoil, mais que faire d'autres que de leur rendre un salut?

Il semble que vous ne soyez plus "un simple assassin" messire.

Aujourd'hui on parle de moi en bien car la guerre vient de se finir par une éclatante victoire. S’ils connaissaient mon passé, ils parleraient de moi en mal.
Et pour finir, quoi qu'il arrive, d'ici quelques temps je redeviendrais un simple assassin dont le temps aura fait oublier les actes.

Puis releva la tête tout en regardant le Capitaine Koveras sourire.

Et ce n'est pas plus mal, je ne cherche pas à être célèbre, sinon je ne pourrais plus être aussi efficace en tant qu'assassin.

La modestie de l'assassin ravit au plus au point le héraut du Calice. La plupart des brutes étaient aussi avides de reconnaissance qu'elles l'étaient de sang ou d'or. Dartoil faisait bien son office, et il servait le Calice pour la justesse de sa cause...
Koveras piochait dans la victuaille et, peu à peu, Dartoil put discerner par divers signes que le chancelier n'avait pas menti en faisant allusion à ses modestes origines. La rudesse des gestes, la hâte et l'appétit non maîtrisé indiquaient que Koveras mangeait comme mangent les marchand ou outre roturiers en fond. Peut-être la convivialité de l'auberge lui permettait-elle de se débarrasser pour un temps de la retenue qu'il s'efforçait de montrer en public?
Gêné par la fine observation de Dartoil, Koveras jugea bon de dire quelque chose. Il chercha un bref instant et crut discerner une opportunité :

Messire.. (il s'essuya la bouche, puis les mains, tout en finissant de mâcher)..dans quelques temps aura sans doute lieu un banquet organisé par mes soins. Quelques personnes y seront présentes et j'aimerai vous y convier. Je ferai en sorte que les mets soient nombreux, riches et variés, le vin de qualité et l'animation à la hauteur des convives. Qu'en dites-vous?

Assassin d'Elite du Calice Messages : 228 Date d'inscription : 18/05/2009

Les attitudes du capitaine en apprenait beaucoup sur lui et son passé, Dartoil observait et analysait les moindres geste tout en gardant une attitude normal en mangeant.

Koveras changea alors de sujet et l'invita à un banquet. L'assassin resta silencieux pendant quelques instant, songeant à cette proposition. Les amusements de se genre n'était ni dans ses habitudes, ni dans ses gouts. Le fait même de se retrouver dans la lumière au milieu de nombreuse personne le gênait. Il était également hors de question de se laisser allé à faire des courbettes auprès de tous ses inconnus de bonne société.

Malgrè ses pensés, son visage était rester neutre, sans laisser paraitre ses émotions. En revanche ce court silence était très évocateur de son hésitation.

Je suis très honoré que vous m'invitiez à une fête que vous organisez, mais même si j'apprécie la discussion avec vous, ce genre d'endroit n'a jamais été pour moi.
Pour ne pas vous blesser dans cette offre généreuse, je ne la refuserait pas, mais je ne l'accepterait pas non plus. Disons que ma venue ou non venue sera la surprise, mais ne soyez pas vexé si finalement vous ne m'y voyez pas, cela n'aura rien à voir avec vous.